Pages vues le mois dernier

mercredi 31 août 2016

A propos du futur bataillon OTAN « allemand » en Lituanie


Les drapeaux des Etats membres de l'OTAN devant le Palais présidentiel à Vilnius 

Suite à l'occupation et à l'annexion de la Crimée, au mépris des accords internationaux, et à l'implication de la Russie dans le conflit de l'est de l'Ukraine, l'OTAN a pris, en juin 2016, des mesures dissuasives dites de « réassurance » afin de protéger la Pologne et les États baltes. Il a été notamment décidé de déployer dans chacun de ces quatre États membres de l'OTAN un bataillon de 800 à 1 000 soldats qui seront stationnés par rotation pour six à neuf mois.

Au sommet OTAN du 8 juillet 2016 à Varsovie, il a été décidé que les nations-cadres seraient :
# En Estonie, le Royaume-Uni
# En Lettonie, le Canada
# En Lituanie, l'Allemagne
# En Pologne, les États-Unis

M. Juozas Olekas, Ministre de la Défense (en civil), avec le Lieutenant General Jonas Vytautas Žukas, Chef d'Etat-Major des Armées lituaniennes (au milieu)

Ce mardi 30 août, il a été annoncé par M, Juozas Olekas, Ministre de la Défense lituanien, que le bataillon OTAN de Lituanie serait stationné au camp de Rukla, à côté de Jonava, à mi-chemin entre Kaunas et Ukmergė. La structure de ce bataillon, dont la nation-cadre est donc l'Allemagne, n'est pas encore connue avec exactitude, Mais la Belgique (avec 150 hommes), les Pays-Bas, la Norvège et la Croatie ont d'ores et déjà assuré qu'ils y participeraient.

"Portes ouvertes" au camp de Rukla

On me permettra de juger ce choix judicieux dans la mesure où, outre une position centrale en Lituanie, et des moyens d'entraînement développés, le bataillon OTAN sera juxtaposé à des forces lituaniennes qui y sont stationnées :
# Le PC de la Brigade « Loup de Fer » (Mechanizuotoji pėstininkų brigada „Geležinis Vilkas" )
# Le bataillon mécanisé « Grand-duc Algirdas » (Lietuvos didžiojo kunigaikščio Algirdo mechanizuotasis pėstininkų batalionas)
# Le bataillon mécanisé « Grand-duc Vaidotas » (Kunigaikščio Vaidoto mechanizuotąjis pėstininkų batalionas)
# Le bataillon d’artillerie « Général Giedraitis » (Generolo Romualdo Giedraičio artilerijos batalionas)
# Le régiment d'entraînement « Hetman Radvila » (Didžiojo Lietuvos etmono Jonušo Radvilos mokomasis pulkas), qui dépend du Commandement de l’entraînement et de la Doctrine



La France va participer modestement à ce dispositif terrestre OTAN en envoyant 150 hommes au sein du bataillon britannique en Estonie.

Vue partielle de la ville de combat de Pabradė

On notera que, concomitamment, ce même mardi 30 août, a été inaugurée au camp de Pabradė, dans l'est de la Lituanie, une ville de combat, la première dans les États baltes, où l'armée lituanienne et les alliés de l'OTAN pourront venir s'entraîner à la défense contre un combat « hybride ».

En outre, a lieu aujourd'hui, 31 août, la relève du dispositif de police du ciel, la France prenant la mission depuis la base de Zokniai/Šiauliai en Lituanie avec 4 Mirage 2000-5F, et l'Allemagne depuis la base d'Ämari en Estonie avec 4 Eurofighter Typhoons.


mardi 23 août 2016

Le jour où se tenir par la main a changé le monde

(Reprise d'un post du 23 août 2013)


Le 23 Août 1989, en pleine occupation soviétique, deux millions d’Estoniens, Lettons et Lituaniens se sont donné la main sur plus de 600 km, entre Vilnius et Tallinn via Riga. Le but de cette chaîne humaine (en Estonien Balti kett, en Letton Baltijas ceļš et en LituanienBaltijos kelias) était d’attirer l’attention du monde sur le Pacte Molotov – Ribbentrop du 23 Août 1939 par lequel les deux puissances totalitaires du XXe siècle, l’Allemagne nazie et la Russie soviétique, s’étaient partagé l’Europe de l’Est. 



Tout avait commencé le 23 Août 1986 où le « Black Ribbon Day », destiné à attirer l’attention sur les violations des droits de l’homme dans les Pays baltes, s’était tenu dans 21 villes de par le monde. En 1987, on comptait 36 villes participantes, dont Vilnius, Riga et Tallinn. En 1988, pour la première fois, les autorités occupantes ne procédèrent pas à des arrestations. Ce qui encouragea les organisateurs baltes, Rahvarinen en Estonie, le Front Populaire de Lettonie et Sajūdis en Lituanie, à frapper un grand coup pour le 50ème anniversaire du Pacte Molotov – Ribbentrop. Mais que l'on s'imagine les trésors d'ingéniosité qu'il a fallu déployer pour organiser un tel événement au nez et à la barbe des occupants soviétiques !  

Le Pacte Molotov – Ribbentrop (officiellement « Traité de non-agression entre l’Allemagne et l’Union soviétique ») contenait en effet des protocoles secrets, qui partageaient la Finlande, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne et la Roumanie, tous États souverains en 1939, entre les deux « zones d’influence » de l’Allemagne nazie et de l’URSS. C’est conformément à ces protocoles que l’Allemagne put envahir la Pologne par l’ouest dès le 1er Septembre 1939, puis l’URSS le faire par l’est le 17 Septembre. C’est tout aussi conjointement qu’à la mi-juin 1940, pendant que l’Allemagne, tranquille à l’est, envahissait la France, l’URSS put occuper et annexer les États baltes, la Bessarabie et le nord de la Bukovine.



Le texte du Traité et des protocoles secrets, sauvés sur microfilms, n’apparurent officiellement qu’à la fin de 1947, mais les autorités soviétiques nièrent ces dernier jusqu’en 1989. Staline fit même publier en 1948  « Les falsificateurs de l’histoire », livre dans lequel il prétendait qu’au contraire il s’était opposé à Hitler à propos de ce découpage de l’Europe et dans lequel il dénonçait dans les accords de Munich de 1938 un complot pour agresser l’Union soviétique.

Et c’est justement cette « Voie balte » qui permit que l’Union soviétique change sa politique de négation vis-à-vis de l’existence des protocoles secrets. Car la presse occidentale se fit l’écho de cette manifestation qui témoignait d’un problème, non seulement politique, mais aussi moral, que des Baltes solidaires (environ un quart de toute la population des trois États) avaient exprimé pacifiquement. Suite à cette chaîne, Mikhaïl Gorbatchev donna l’ordre à Alexander Yakovlev, un historien membre du Politburo,  d’enquêter sur l’existence des protocoles. En Décembre 1989, la commission concluait à l’existence des protocoles, mais il fallut encore attendre début 1993 pour que la copie de la version russe soit publiée dans un journal scientifique.



Depuis 2009, le 23 Août est officiellement le Jour du souvenir des victimes du stalinisme et du nazisme dans l’Union Européenne. Quelqu’un s’en est-il soucié en France aujourd’hui ? En 2009 également, la Voie Balte fut inscrite au registre de l’UNESCO « Mémoire du Monde » en tant que « manifestation unique et pacifique qui a uni les trois pays dans leur marche pour la liberté ».


« Tous les totalitarismes sont égaux face à la mémoire ». A méditer alors que la Russie d'aujourd'hui réhabilite le génocidaire Staline.

"La voie balte - vers la Liberté !"

lundi 22 août 2016

L'étrange putsch de Moscou (19 – 22 août 1991) – 2ème partie

Retour de Gorbatchev à Moscou le 22 août

Dans une première partie (http://gillesenlettonie.blogspot.fr/2016/08/letrange-putsch-de-moscou-19-22-aout.html) nous avons vu le déroulement succinct du putsch de Moscou. Commencé le 19 août, il bascula dès le 21 quand une large majorité des troupes envoyées à Moscou se rangèrent aux côtés des manifestants ou firent défection, Le 22 août, tout était terminé,

Les incohérences du putsch

Ce fut sans doute un des coups d’État les plus mal préparés de l’histoire. En effet, la vraie surprise viendra du degré d’impréparation des putschistes qui n’arrivèrent pas à empêcher les manifestations. Parmi les incongruités, on relèvera :

# S’il fut destitué comme Président, Gorbatchev conserva le Secrétariat général du parti communiste et, à ce titre, contrôla toujours, du moins sur le papier, l’armée et le KGB.
# Le « Comité pour l’état d’urgence » censura la télévision, mais laissa diffuser des images de Boris Eltsine fraternisant avec les tankistes.
# De même, le Comité laissa diffuser des appels de Chevardnadze et de Iakovlev appelant à constituer des comités de soutien à Gorbatchev.
# Plus généralement, Eltsine bénéficia d’une totale liberté de déplacement et d’expression, se forgeant ainsi une carrure de héros démocrate.
# Le Comité resta d’ailleurs muet, enfermé au Kremlin, n’osant pas utiliser la force (la Division Taman fera même allégeance à Boris Eltsine), et n’ayant pas non plus recours à la structure du pouvoir : le parti communiste.

Mikhaïl Gorbatchev

A qui profita le "crime" ?

Ce putsch version Pieds Nickelés, dont l’échec a eu une grande influence sur l’Histoire mondiale, a donné lieu à toutes les hypothèses.

La plus couramment admise fut celle du premier degré, un putsch des conservateurs qui échoua du fait notamment de l’opposition de la population qui ne voulait pas revenir en arrière sur les acquis de la perestroïka.  

Une autre version affirma que Boris Eltsine, Président démocratiquement élu de la Russie, était au courant du putsch et qu’il a laissé faire en vue de le récupérer (ce qui est de facto arrivé). C’est indubitablement lui qui a été le bénéficiaire de ce putsch.

D’autres encore pensèrent que c’est Gorbatchev qui avait tout monté, dans une partie de billard à plusieurs bandes visant à discréditer les « durs ». Auquel cas, il s’est planté puisque supplanté par Eltsine, et l’U.R.S.S. a bel et bien implosé le 21 Décembre 1991. Mais, après avoir réclamé son retour au cours du putsch, les Occidentaux ne purent pas faire autrement que d’augmenter leur aide économique et financière à l’URSS dans les mois qui suivirent.
   
(NB : les putschistes furent arrêtés, condamnés, puis amnistiés en 1994. Ils eurent une fin de vie paisible, à l’exception de Boris Pougo qui s’est suicidé …… ou qui a été suicidé).

Vladimir Poutine décorant Dmitri Iazov, ancien Ministre de la Défense


Aujourd’hui, la Russie est dirigée par un ancien Lieutenant-colonel du KGB qui a déclaré que la chute de l’URSS était la plus grande catastrophe du XXe siècle et qui n’a de cesse de faire revenir, y compris par la coercition, l’étranger proche dans le giron de la Russie. 

Alors, tout ça pour ça ?   

Poutine et Eltsine





vendredi 19 août 2016

L'étrange putsch de Moscou (19 – 22 août 1991) – 1ère partie



Vingt cinq ans après, nous n'avons toujours fini fini d'apurer les comptes suite à l'étrange putsch qui s'est déroulé à Moscou du 19 au 22 août 1991. Après être revenu, dans cette première partie, sur les faits, je mettrai en exergue, dans une deuxième partie, les incohérences et j'essaierai d'en tirer des conclusions.

1ère partie : Les faits

Le 19 Août 1991 au matin, les Russes, et au-delà les soviétiques, qui avaient appris à lire entre les lignes, se doutèrent qu’il se passait quelque chose car leur télévision passait en boucle le « Lac des cygnes » ! En effet, ce 19 Août à 6H du matin, un « Comité d’État pour l’état d’urgence » s’approprie le pouvoir au Kremlin. Parmi les comploteurs, il y a du beau monde. A commencer par Guennadi Ianaïev, Vice-président de l'URSS, Valentin Pavlov, Premier Ministre de l'URSS, Vladimir Krioutchkov, Président du KGB, Boris Pugo, Ministre (letton) de l'Intérieur et Dmitri Iazov, Ministre de la Défense.

Guennadi Ianaïev, chef des putschistes

C'est la publication du projet de traité de l'Union, le jeudi 15 août, qui a précipité l'instauration de cet état d'urgence, opération envisagée depuis quelque temps. Alors que six des quinze républiques soviétiques (les trois républiques baltes, la Moldavie, la Géorgie et l'Arménie) restaient à l'écart d'une négociation qui leur paraissait incompatible avec leur aspiration à l'indépendance, les neuf autres avaient accepté de participer à l'élaboration des nouvelles règles du jeu de l’URSS. Mais, même pour celles-ci, les dispositions sont floues, ambiguës, voire contradictoires et ne satisfont personne. Ainsi, comment concilier la disposition qui fait de chaque république "un État souverain" et celle qui qualifie la nouvelle Union des Républiques soviétiques souveraines d'"État fédéral démocratique et souverain" ?

Mikhaïl Gorbatchev, Secrétaire général du parti communiste et Président de l’Union soviétique,  est depuis le 4 août en vacances en Crimée dans sa somptueuse datcha de Foros. Le 18 août, une délégation des conjurés arrive là-bas, le relevant de ses fonctions et le séquestrant.  Ils justifient le « départ » du Président par une incapacité d'exercer ses fonctions pour des raisons de santé, argument déjà invoqué pour destituer Khrouchtchev en 1964, déjà en séjour sur les bords de la Mer Noire…….  

Mikhaïl Gorbatchev

Les huit putschistes du « Comité d’État pour l'état d'urgence », représentant un éventail des principaux intérêts menacés par la politique de réformes de Mikhaïl Gorbatchev, proclament l'état d'urgence, rétablissent la censure et font entrer les chars à Moscou.

Très rapidement, des manifestations importantes contre les dirigeants du coup d'État se déroulent à Moscou et à Leningrad (ancien nom de Saint-Pétersbourg) et le président de la Russie, Boris Eltsine,  dirige la résistance depuis la Maison Blanche, le parlement russe. Un assaut planifié du bâtiment par la force ALFA, force spéciale du KGB, échoue après que les troupes eurent unanimement refusé d'obéir. Durant l'une des manifestations, Eltsine se tint debout sur un blindé pour condamner la « junte ». L'image, diffusée dans le monde entier à la télévision, devint l'une des images les plus marquantes du coup d'État et renforça très fortement la position de Eltsine. Le 21 août 1991, une large majorité des troupes envoyées à Moscou pour soutenir le putsch se rangea au contraire ouvertement aux côtés des manifestants ou firent défection.

Boris Eltsine (à gauche) sur "son" char. 

Dès le 22 août 1991, tout était terminé, l'armée avait fraternisé avec la foule, après que Boris Eltsine, monté sur un char, ait appelé à défendre le pouvoir légitime de Gorbatchev. Mikhaïl Gorbatchev put regagner Moscou. Les putschistes furent arrêtés.

A suivre



jeudi 18 août 2016

Honoré de Balzac, à travers la Lettonie et la Lituanie

Honoré de Balzac

Le 18 août 1850 (il y a donc exactement 166 ans) meurt à Paris Honoré de Balzac (1799 – 1850), un des écrivains français les plus prolixes, mais aussi un grand voyageur. Ses voyages dans l'Empire de Russie (Saint-Pétersbourg et Ukraine) avaient toutefois un but bien particulier : rencontrer sa bonne amie la comtesse Hańska (1801 – 1882) !

Née Ewelina Rzewuska, la comtesse Hańska était portée sur le mysticisme et lisait beaucoup de romans français. Devenue une fervente admiratrice de Balzac, elle engagea en 1832 une correspondance avec l’auteur et le rencontra pour la première fois au bord du lac de Neuchâtel. Balzac en tombe amoureux et va la courtiser pendant 17 ans. Ils se rencontrent à plusieurs reprises jusqu’en 1835, mais ce n’est qu’après le décès de son mari, Venceslav Hanski, que la comtesse accepte que Balzac vienne la retrouver à Saint-Pétersbourg, où elle s’était rendue pour régler la succession du comte.

La comtesse Hańska

Honoré de Balzac quitte Paris le 19 juillet 1843 pour s’embarquer à Dunkerque le 21 juillet sur le paquebot à vapeur Le Devonshire. Il arrive à Saint-Pétersbourg le 29 juillet et va y vivre une vie discrète, apparemment suivant le désir de Mme Hańska, soucieuse « de ne pas trop montrer son célèbre et exubérant ami ». Il reçoit toutefois plusieurs invitations et voit même le Tsar « à la distance de cinq mètres » à l’occasion d’une revue de troupes à Krasnoïe Selo, mais il ne lui est pas présenté. Durant ces semaines passées à Saint-Pétersbourg, il travaille peu.

C’est le 7 octobre que Balzac quittera Saint-Pétersbourg par la malle-poste, en direction de Berlin. On connaît le comportement de l’écrivain grâce aux lettres qu’un de ses compagnons de voyage qui se rendait à Rome, le jeune sculpteur russe Ramazanoff, envoie à sa famille.

Leur itinéraire passe par Narva (Estonie), où les lamproies qu’on lui sert au petit déjeuner inspirent a priori du dégoût à Balzac. Ce n’était que le début des déconvenues gastronomiques de l’écrivain. A Dorpat (aujourd’hui Tartu en Estonie), on lui sert « un bifteck récalcitrant aussi dur que les chemins caillouteux des provinces parcourues », ce qui lui fit dire : « Il faut avoir bien faim pour manger ça; c’est un tour de force » ! A Walki (Valka), c’est une pâtisserie qui n’est pas à hauteur de ses espérances puisqu’il ne subsiste que l’enseigne, représentant des gâteaux.

Le Traité de Nystad (10 septembre 1721), mettant fin à la Grande Guerre du Nord (1700 – 1721), avait consacré l’intégration des provinces baltes dans l’Empire russe. Pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle, Riga connut un grand essor industriel et, au XIXe siècle, la ville était devenue un des trois ports les plus importants de l’Empire russe et un centre ferroviaire majeur. Balzac constata : « En entrant dans les rues étroites de Riga, encombrées de hautes maisons à l’architecture originale, nous trouvâmes l’activité bruyante d’une ville commerçante »

Le passage à Mitau (aujourd’hui Jelgava en Lettonie) fut marqué par une altercation entre l’écrivain affamé et les serveuses d’une auberge, pas assez promptes à servir leur hôte. Le met tant attendu se révéla être une mauvaise soupe « Chez nous on donne ça aux cochons » fulmina-t-il. Il se consola avec une omelette qui fut le seul et maigre réconfort de ce triste repas. Heureusement que, pour compenser des qualités gastronomiques perfectibles, Balzac avait emporté un panier rempli de bouteilles de vin de Sauternes, dont la dernière sera ouverte à Tauroggen (Tauragė), à l’occasion du …… petit déjeuner.

Le 10 octobre 2013, inauguration d'une plaque rappelant le passage d'Honoré de Balzac à Tauragė, en présence de S.E. Mme Maryse Berniau, Ambassadeur de France en Lituanie


Le 10 octobre, les voyageurs sont effectivement à Tauroggen /Tauragė, aujourd’hui en Lituanie mais alors à la frontière russo-prussienne. Les passagers ne virent pas de sentinelle, la guérite étant cachée par la verdure. Sur la route, il n’y avait que deux poules qui se promenaient. « Voyez, un grand empire comme la Russie est gardé par des poules » s’exclama Balzac !

Le samedi 14 octobre matin, Balzac arrive à Berlin où il trouve « le premier lit qui ressemble à un lit depuis qu{‘il a} quitté Dunkerque » ! Il sera de retour chez lui, à Passy, le 3 novembre 1843 au soir.

On notera que, tout au long du voyage, Balzac irritera régulièrement ses compagnons de voyage, en proclamant « qu’il n’y ait de bien que ce qui est en France ». Le jeune Ramazanoff écrira : « Il était agréable de voir son attachement à la terre natale s’exprimer dans ses propos impétueux {…}.Mais il n’était pas agréable d’entendre ses comparaisons et ses opinions sur les autres pays ».

Le mariage de Balzac et de Mme Hańska sera célébré dans l’église catholique Sainte-Barbe de Berditchev (Berdytchiv en ukrainien) le 14 mars 1850. Le 24 avril 1850, Monsieur et Madame de Balzac prennent la route de Paris, où ils arrivent le 21 mai. Mais la santé de l’écrivain se dégrade de jour en jour. Laxatifs et saignées n’empêchent pas les fréquentes syncopes. Victor Hugo, qui a toujours loué son génie, le veille jusqu’au dernier souffle. Dans la nuit du 18 août 1850, Balzac s’éteint à l'âge de 51 ans. Sa veuve ne retournera jamais en Ukraine.


Pour en savoir plus sur Balzac en Russie : « Balzac dans l’Empire russe – De la Russie à l’Ukraine », Paris-Musées / Editions des Cendres, 1993






mercredi 17 août 2016

29 août : élection présidentielle en Estonie



D'ici la fin de l'année, un certain nombre d'élections, plus ou moins libres, vont concerner les Etats baltes :

            29 août -           ESTONIE - Élection présidentielle
11 septembre - BÉLARUS - Élections législatives
18 septembre - RUSSIE - Élections législatives
9 octobre -       LITUANIE - Élections législatives
8 novembre - USA - Élection présidentielle + élections su Sénat et à la Chambre des Représentants
L'élection présidentielle en Estonie fait aujourd'hui l'objet de ce post.

Le Président de la République d'Estonie ( Eesti Vabariigi President) est élu pour 5 ans, renouvelable une seule fois. Le Président actuel, Toomas Hendrik Ilves, en poste depuis le 9 octobre 2006, ne peut donc pas se représenter. L'élection du nouveau Président, qui a une fonction essentiellement représentative et n'a pas de pouvoir exécutif important, obéit à un processus relativement complexe.

Le Président sortant, Toomas Hendrik Ilves

Le Président est élu au suffrage universel indirect, au départ par les 101 membres du Parlement, le Riigikogu. Pour être élu, un candidat doit obtenir 2/3 des suffrages des députés, soit 68 voix. Si aucun candidat n’obtient suffisamment de voix, un deuxième tour est organisé le lendemain, auquel de nouveaux candidats peuvent se présenter. Si aucun candidat, une fois de plus, n'atteint la majorité des 2/3, un troisième tour de scrutin est organisé le même jour, avec seulement les deux candidats ayant obtenu le plus de voix au deuxième tour.

Mais il est relativement courant que le Parlement n'arrive toujours pas à dégager une majorité des 2/3 après ce troisième tour (ce fut le cas en 1996, 2001 et 2006). Le président du Parlement a alors un mois pour convoquer une assemblée électorale constituée des 101 députés et de représentants des 213 communes (30 villes et 183 communes rurales), choisis au sein des conseils communaux, le nombre étant fonction de la taille démographique de la commune.

Au sein de cette assemblée électorale, la majorité requise pour élire le Chef de l’État n'est alors plus des 2/3 mais la majorité simple. Si aucun candidat ne recueille plus de 50 % des voix lors d'un premier tour, on procède alors à un second tour de scrutin entre les deux candidats arrivés en tête au premier tour.

Peut être candidat tout citoyen âgé d'au moins 40 ans, ayant obtenu la nationalité estonienne à la naissance et recevant le soutien d'au moins 1/5e des membres du Parlement, soit 21 députés. Sont à ce jour des candidats confirmés :

# Allar Jöks, ancien chancelier de justice
# Mailis Reps, ancienne Ministre de l'Education
# Siim Kallas, ancien Premier Ministre et ancien Commissaire européen aux Transports

Mais, on l'aura compris, d'autres candidats peuvent apparaître en cours de processus, et on pense notamment à Marina Kaljurand, indépendante, actuelle Ministre des Affaires étrangères, qui a la faveur des sondages du public (25 % en juin, contre 11 % à Jöks et Kallas, et 2 % à Reps …….). Sauf que le public ne vote pas !

Marina Kaljurand, favorite des sondages



Réponse à partir du 29 août.

lundi 15 août 2016

15 août 1812 : baptême de la Place Napoléon à Vilnius

Le jeune Buonaparte à l'Ecole de Brienne


Le 15 août 1769 naît en Corse un certain Napoleone, deuxième fils de Charles et Laetitia Buonaparte, famille de la petite noblesse corse d'origine génoise. A la vérité, l'incertitude plane quant au lieu exact de la naissance (maquis ou maison familiale d'Ajaccio) et à la date, la coïncidence avec la date de l'Assomption pouvant être le fruit d'une propagande tardive.

L’île, qui appartenait jusque là à la République de Gênes, est administrée par la France depuis juillet 1768 et deviendra officiellement française dix ans plus tard. Le nationaliste Pascal Paoli a quitté la Corse le 13 juin 1769, mettant un terme à quarante ans de révolte armée contre la République de Gênes.

Grâce à l'appui du gouverneur français de l'île, le comte Louis de Marbeuf, Napoléon et son frère aîné Joseph reçoivent une bourse pour étudier sur le continent à partir de 1778, d'abord au collège d'Autun. Puis en 1779 à l’École Militaire de Brienne. En septembre 1785, à tout juste 16 ans, il est nommé Lieutenant en second au Régiment d'artillerie de La Fère.

Dans la nuit du 23 au 24 juin 1812, la Grande Armée franchit le Niémen à hauteur de Kaunas : c'est le début de la campagne de Russie. Le 28 juin, celui qui est devenu l'Empereur Napoléon 1er entre à Vilnius, où il va rester 19 jours, faisant de l'actuelle capitale de la Lituanie sa capitale administrative et militaire, ainsi que la base de ses futures opérations. Il s'installe dans le bâtiment qui a précédé l'actuel Palais Présidentiel, qui avait été Palais épiscopal jusqu'en 1795, puis, lorsque le Grand-duché de Lituanie avait perdu son indépendance, palais du Gouverneur russe.

L'actuel Palais présidentiel à Vilnius


Pendant cette période dite française, la vie publique fut intense. Il y eut des spectacles, des soirées dansantes, des loteries, mais aussi des fêtes pour célébrer des événements divers. Le 14 Juillet, le Général comte Liudvikas Mykolas Pacas donna un bal dans son palais du 7 rue Didžioji (où il hébergeait le Prince Murat), au cours duquel Napoléon fit une apparition. Le 16 juillet, la Grande Armée reprend sa marche vers Moscou, Napoléon lui-même quittant Vilnius vers 23H.

Mais l15 Août 1812, date anniversaire de la naissance de l’Empereur, le Maire de Vilnius, Mykolas Römeris (1778 – 1853 ; à ne pas confondre avec le juriste éponyme – 1880-1945 - qui donnera son nom à une université de Vilnius) fait baptiser la place devant le palais épiscopal en Place Napoléon. Pour l’anecdote, la place sera rebaptisée par les Russes Place Mouraviev, du nom du comte Mikhaïl Nikolaïevitch Mouraviev (1796 – 1866), gouverneur de l’ex-Grand duché de Lituanie et chargé de la répression après l’insurrection de 1863 (ce qui lui voudra le surnom de « pendeur de Vilnius »). Assez étonnamment, lors de leur occupation de la Lituanie à partir de 1915, les Allemands rebaptisèrent la place Napoleon Platz !

On notera qu'une plaque commémorative avait été apposée le 5 mai 1921 pour rappeler le souvenir de ce séjour, La plaque était encore présente en 1944, des Officiers du Régiment de chasse « Normandie-Niémen » s'étant faits photographier devant. Elle a depuis disparu, à l'époque soviétique.

Cérémonie du 25 juin 2012, commémorant le franchissement du Niémen au cimetière d'Antakalnis (Vilnius)