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jeudi 24 avril 2014

Mai 1944 : le Convoi 73 en Lituanie et en Estonie

Inscription "Nous sommes 900 Français" sur les murs du Fort IX de Kaunas

Le Convoi 73 est le seul des 79 convois des Juifs de France, déportés par les nazis, qui ait eu pour destination les Pays baltes. A ce jour, on ignore toujours la raison pour laquelle ce train  a été dirigé vers cette destination et on l’ignorera, sauf surprise, sans doute toujours.

Le Convoi 73, constitué de 15 wagons à bestiaux, a quitté Drancy le 15 Mai 1944. Il avait pour caractéristique de ne comporter que des hommes dans la force de l’âge, entre 12 et 66 ans, en tout 878. Au départ, il leur avait été dit qu’ils allaient travailler pour l’organisation Todt, groupe de génie civil et militaire allemand chargé de la réalisation de constructions, civiles comme militaires, en Allemagne et dans les pays occupés. En fait, le convoi s’est d’abord dirigé vers la Lituanie qu’il atteint après trois jours d’un voyage éprouvant.

Monument (soviétique) au Fort IX de Kaunas

Dix des quinze wagons sont restés à Kaunas, et ce sont environ 600 hommes qui ont été dirigés vers le IXe Fort puis, peu de temps après, vers le camp de travail de Pravieniškės, à une vingtaine de kilomètres de Kaunas. Ils furent soumis au travail forcé avant d’être exécutés par groupes dans la forêt. Les cinq autres wagons ont continué jusqu’à Reval, aujourd’hui Tallinn, et les déportés ont d’abord été internés à la prison de Patarei, puis utilisés à réparer les pistes du terrain d’aviation de Lasnamaë. Ils furent làa aussi assassinés dans leur grande majorité. 

Prison de Patarei à Tallinn

Deux frères germanophones, Harry et Félix Klein, avaient réussi à s’échapper de Pravieniškės. 34 avaient quitté Reval/Tallinn en bateau pour Dantzig et avaient été internés à Stutthof, un immense camp de concentration et d’extermination où se trouvaient des centaines de Juifs de toutes provenances, détenus dans des conditions épouvantables. Seuls 22 des 878 hommes du Convoi 73 ont survécu après la guerre, et ont pu rentrer en France en Mai 1945. Parmi les victimes, on compte le père et le frère de Madame Simone Veil, elle-même déportée à l’âge de 16 ans à Auschwitz-Birkenau. Le pire est que les familles ignorent où leur parent a été exécuté.

Madame Simone Veil

Comme je l’écrivais plus haut, on ignore la raison pour laquelle le train a été dirigé vers les Pays baltes. Après la guerre, les Allemands n’ont pas donné d’explication formelle quant à cette destination exceptionnelle. Une « erreur d’aiguillage » étant peu vraisemblable, une des théories serait que les Allemands aient fait venir des « brûleurs de cadavres » ne parlant pas la langue locale, de façon à ce qu’aucun témoignage ne puisse filtrer sur les exactions qui se déroulaient au fort.

L’Association des familles et amis des déportés du Convoi 73, regroupant environ 350 familles représentant 280 déportés, organise du 5 au 9 Mai 2014 son dixième voyage de mémoire. Chaque voyage passé a été l’occasion d’un événement particulier, inauguration découverte, participation d’un invité. Celui de cette année donnera lieu à l’inauguration d’un monument mémorial sur le site de l’aérodrome de Lasnamaë, en présence de S.E. M. Michel Raineri, Ambassadeur de France en Estonie.

Aujourd’hui, il reste un survivant de ce convoi, Monsieur Henri Zajdenwergier, qui a fêté ses 86 ans en Décembre 2013 et qui avait donc 16 ans en 1944. Il est toujours très actif et participera au voyage de Mai 2014. Je l’avais rencontré lors d’un précédent voyage, et son témoignage est essentiel pour que ne recommencent plus de telles horreurs. Je ne peux que vivement encourager ceux qui le peuvent, à Kaunas, Vilnius ou Tallinn, à s'associer à ce devoir de mémoire pour le transmettre aux générations futures.   

Pour en savoir plus, le site de l’’Association des familles et amis des déportés du Convoi 73 : http://www.convoi73.fr/ dont sont extraites les photos de ce post. Merci à sa Présidente, Madame Louise Cohen, et à Monsieur Isy Szeier pour ce contact qui perdure.

M. Henri Zajdenwergier recevant au Sénat, le 16 Mai 2013, les insignes de Chevalier de la Légion d'Honneur des mains de S.E. M. Frédéric Billet, Ambassadeur de France en Estonie


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