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vendredi 1 juillet 2011

Quand Marennes (Charente-Maritime) a failli devenir courlandaise !


Le Duché de Courlande et Sémigalle (Kurzemes un Zemgales hercogiste - ci-dessus) a été un Etat sous suzeraineté polonaise de 1561 à 1795, créé suite à la sécularisation des possessions des Chevaliers Porte-glaives. Mais il était de facto quasiment indépendant. Sa capitale était Mitau, aujourd’hui Jelgava, et il a connu deux dynasties : les Kettler (1561 – 1737) et les Biron (1737 – 1795), avec une période appelée le temps des troubles, de 1737 à 1763.

Le Duché de Courlande a connu son apogée sous le Duc Jacques Kettler (Jekabs fon Ketlers – ci-dessous) qui fut d’abord régent de 1638 à 1642, puis souverain de 1642 jusqu’à sa mort, le 1er Janvier 1682). C’est sous son règne que la Courlande de dota d’une flotte de commerce très importante et qu’elle devint le plus petit état européen colonisateur.

Dès 1634, 212 colons sont envoyés dans l’île caraïbe de Tobago, mais ceux-ci désertèrent. Une autre expédition connut apparemment le même sort en 1637. Le 20 mai 1654, une expédition de 80 familles dirigée par un capitaine hollandais, engagé par le Duc Jacques, jette l'ancre à Tobago et renomme l'île Nouvelle-Courlande. Rapidement, les Courlandais construisirent le fort Jakobus et la ville de Jamestown s’appelait alors logiquement Jekaba pilseta. Mais les colons se heurtèrent rapidement aux Néerlandais, notamment lorsque le Duc fut fait prisonnier par les Suédois au cours de la guerre du Nord. La colonie courlandaise capitula le 11 Décembre 1659.

Simultanément, les Courlandais installèrent trois comptoirs à l’embouchure du fleuve Gambie en Afrique : le Fort Jacob (toujours en référence au Duc Jekabs) sur l’ile Saint-André, Fort Bayona sur l’ile Sainte-Marie et le Fort Jilifree à Juffureh (ci-dessus). À partir de 1651, et jusqu'à ce que les Anglais s'en emparent en 1661, l'île fut un comptoir d'esclaves du commerce triangulaire (en liaison notamment avec l'île courlandaise de Tobago.

Le pavillon des navires courlandais
Cette colonisation, certes éphémère, aura été rendue possible par la politique de construction navale du Duc Jekabs. Alors que jusqu’en 1642 le chantier naval de Windau (aujourd’hui Ventspils) produisait un navire par an, il en produisit 135 pendant le règne du Duc, principalement entre 1642 et 1658, c’est-à-dire plus de 8 par an. Sur ces 135, 24 navires furent vendus à la France, sans parler de la poudre à canon, des canons eux-mêmes et d’autres armements, les besoins français ayant augmenté en raison de la guerre avec l’Espagne (1635 – 1659). Un traité commercial fut d’ailleurs signé entre Louis XIV et le Duc Jekabs le 30 Décembre 1643. La Courlande avait des agents consulaires notamment à Bordeaux, Nantes, Marseille et La Rochelle.

C’est un peu plus tard, en 1664, que le Duc de Courlande exprime le souhait d’acheter Marennes. Dans ses mémoires, Jean-Baptiste Colbert, alors membre du Conseil Royal des Finances et Surintendant des Bâtiments et Manufactures, fait savoir que le Roi Louis XIV est favorable à cette transaction. C’est quelque peu étonnant puisque, alors que le port proche de Brouage est en train de s’envaser et est petit à petit abandonné au profit de Rochefort, Marennes connait une réelle prospérité grâce au sel récoltés dans les salines et expédié dans toute l’Europe du Nord, mais aussi à la pêche à la morue.

La transaction ne se fit pas. Je n’ai pas encore trouvé pourquoi. Mais voilà de quoi occuper mes longues soirées d’été ……

Référence: "The reign of Duke James in Courland 1638 - 1682" par Alexander V. Berkis, 1960 

4 commentaires:

  1. Merci Gilles pour ce post très intéressant ,dommage que vous n'ayez pas encore trouvé pourquoi la transaction ne se fit pas !
    Mais j'ai confiance dans votre tenacité ,vous n'avez pas dit votre dernier mot ;)

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  2. J'ai lu au sujet de cet épisode dans Courlande de JP Kauffman l'avantage de ton billet c'est qu'il est très bien illustré. Je vais le mettre en lien avec mon blog quand j'écrirai le billet sur Courlande

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  3. Il y aurait tout un livre, voire une thèse, à écrire sur les relations franco-courlandaises à l'époque du Duc Jekabs.

    J'essaye de faire des posts relativement courts (une page A4), structurés et didactiques, et surtout exempts d'erreurs historiques. Je ne dis pas que j'y arrive tout le temps, mais je me soigne.....

    Le livre de Kauffman est bien écrit, mais c'est plutôt un roman, qui est toutefois exempt d'erreurs historiques.

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  4. Je n'ai, pour l'instant, trouvé rien de neuf sur la Courlande et Marennes. Par contre .....

    Par la paix d'Oliva, la Courlande avait perdu ses colonies et le Duc Jekabs n'aura de cesse de les récupérer ou d'en récupérer d'autres.

    C'est ainsi qu'en 1677, comme la France avait une dette colossale vis-à-vis de la Courlande (retard de paiement des 24 navires livrés), le Duc suggéra qui le Roi de France lui donne "la Martinique ou une autre ile" dans les Antilles ! Cette demande n'eut pas de suite .....

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